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Au
répertoire des Petites Affaires Criminelles de la Vienne, la femme qui n’a pas
encore sa journée, n’est pas toujours
l’avenir de l’homme.
Le soir du 3 Juillet 1730, Jean Bonneau,
marchand, 32 ans, arrive à cheval dans les prés de la cure de Latillé,
déterminé à y laisser brouter sa monture. Mais c'est compter sans la
détermination de l'exploitante des lieux, Catherine Delamosse. Elle interpelle
le cavalier, le somme de partir. Il la bouscule, elle se relève et lui envoie
son sabot tout crotté à la figure ! Assommé, Bonneau fait marche arrière tandis
qu’une équipe de gaillardes vient à sa rescousse se charger de la vilaine : sa
femme, Marie Cante, et ses trois belles-sœurs, Gabrielle, Renée et Jeanne.
Suit un sacré crêpage de chignons qui
interloque le voisinage et se termine, outrage suprême, par la mise en
pièces de la coiffe de Catherine, qui s'enfuit tête nue, honteuse, sous la
risée de certains. Tête nue, voilà une offense qui mérite réparation ! Au
XVIIIème siècle, honte à celle qui sort « en cheveux » !
Agressée à nouveau par les mêmes furies,
quatre jours plus tard, Catherine porte plainte. Tout le village est en
émoi et le sénéchal instruit rapidement l'affaire.
Les témoignages recueillis le 8 juillet
sont concordants : l'altercation à l'initiative de Bonneau, le coup de sabot,
et suite au coup, l'oeuf de pigeon (qui n’a peut-être que la taille d'une
fève), la fureur des femmes, la coiffe déchirée, la honte...
Une expertise médicale de la plaignante
est demandée auprès du chirurgien local. Celui-ci constate des blessures
superficielles, auxquelles s’ajoute, suite à la seconde agression, une fièvre pour
laquelle il prescrit une saignée.
L’histoire pourrait se réduire à une
savoureuse affaire de gaillardes au marché de Latillé et prêter à sourire.
D’autant plus qu’à la suite de Catherine, Jean Bonneau porte plainte à son tour. On diligente alors
une nouvelle enquête, on interroge une nouvelle série de témoins, qui apporte
un éclairage différent. Le ton devient plus grave. Ce n'est plus un, mais
plusieurs coups de sabots que le pauvre homme aurait subi et la réaction des
femmes Cante en réponse l’agression apparait par conséquent, tout à fait
justifiée. Il faut dire que cette fois, fini la journée des femmes, seuls les
hommes sont entendus…
Le sénéchal doit statuer le 10
Juillet, mais au matin de ce jour-là, coup de théâtre !
Un bruit lui arrive du marché : Jean
Bonneau est mort !
La farce tourne au tragique ! La
responsabilité de Catherine est retenue, la voilà immédiatement arrêtée et conduite en
prison, pour y être de nouveau interrogée.
Jean Bonneau, lui, est enterré, entouré
des femmes de sa famille et de son beau-frère. Il laisse à la charge de sa
veuve, deux jeunes enfants Renée deux ans et Jeanne Geneviève, deux mois.
L’archive, hélas, ne dit pas ce qu’il
advint de notre Cendrillon rebelle de Latillé…
Source : AD86 Série 8 B 170.
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