jeudi 6 février 2014

Morts décryptées à Vivonne - Lulu Sorcière Archive dans Centre Presse - 6 Février 2014.

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1818-1824, Mourir à Vivonne…
C'est le six Mars 1818, en rédigeant l'acte de décès de Catherine Proust que l'idée vint à Mr Enard, maire de Vivonne, d'indiquer systématiquement, sur la foi des déclarations de l'officier de santé, la cause du décès de ses compatriotes. Et ce, pendant six ans, offrant ainsi  au généalogiste de passage, un trésor rare ! Mr le maire était-il carabin ? Friand de science ?  C'est à voir. Toujours est-il, qu’une petite initiation à la sémiologie du XIXème siècle permet d'établir quelques éléments statistiques, d'identifier quelques anecdotes. Bref, de faire vivre ces décès !
Le poumon ! Toujours le Poumon !
Catherine Proust est  morte, de « phtisie pulmonaire », c'est à dire de tuberculose. Fluxion de poitrine, consomption, catarrhe pulmonaire, et autres écrouelles, le poumon, toujours le poumon !  Les maladies vermineuses  sont parasitaires et  infantiles. Les fièvres sont cataloguées à la Prévert : scorbutiques, putrides, adinamiques, remittentes, ataxiques, cérébrales, lente, catarrhales, bilieuses, ataxiques, asthéniques, quartes, tierces...Les hidropisies signent l’insuffisance cardiaque.  Si les diarrhées sont à l’évidence asthéniques, certaines affections demeurent bien mystérieuses :. les exquinancies sont des amygdalites, mais que sont ces encophlegmaties, ces dépôts à la tête ? Le grand âge a son cortège d'affections spécifiques : langueur, caducité, la décrépitude est outrageusement féminine... Le crabe lui,  ne signe qu’une fois : «une diathèse cancéreuse » emporte Magdeleine Nicoulaud à 60 ans.
La mort rôde autour des enfants.
Quant aux tout petits  « mort-nés », ou des « suites de naissance », ils sont qualifiés « prématurés », au sens de morts trop tôt. Les enfants paient le plus lourd tribu à la faucheuse : 48,6% des décès ! Suivant parfois le trajet de la sage-femme, de maison en maison, brutale, inexorable, la fièvre puerpérale emporte les mères à peine délivrées.
1824, une mystérieuse épidémie.
En mars 1824, le drame s’annonce au village. Fièvre, rhume, catharres, exquinancies, emportent brutalement  une dizaine d’enfants, 7 le mois suivant. Enard( allez savoir pourquoi)arrête ses relevés étiologiques. En  Mai, le mal est à son comble. Il meurt 24 jeunes de plus. Entre Mars et Avril, 51 personnes disparaissent, 84% sont enfants ou jeunes adultes. Avec un total de 96 décès, la mortalité double à Vivonne, comme alentours, emportant des fratries entières.  Deux ans plus tard, la faucheuse a passé son chemin, la mort reprend son rythme ordinaire, et l’épidémie garde  son mystère. A moins qu’il n’en reste trace dans les comptes-rendus municipaux signés Enard?