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S’il avait
mis, comme ses frères, ses pas dans ceux de son père, il aurait eu de la farine
aux semelles : maîtres pâtissiers sur Poitiers, les Maury régalèrent la
cité. Mais parmi les fils d’Hilaire, Joseph baptisé le neuf février 1737 à
Notre-Dame-la-Grande, choisit un autre destin, il sera chirurgien. A 23 ans, Il
épouse Marie Magdeleine Munyer, fille de maître serrurier, avec qui il aura
neuf enfants !
Alors qu’il
est encore jeune dans son exercice, c’est une sage-femme qui va le lier au
destin des femmes. 1765, Mme Du Coudray parcourt la France pour enseigner l’art
des accouchements, elle vient à Poitiers à la demande pressante de M.de Blossac.
Son but: former les femmes des campagnes, où la mortalité périnatale est
dramatique. Sa méthode : aux élèves illettrées, il faut apprendre en faisant
plutôt qu’en lisant ! Ses outils: sa machine, une idée de génie, qui
reproduit sous forme d’une poupée de tissu, savamment cousue, l’anatomie de la
femme et de l’enfant à naître, permettant de simuler les présentations et les
gestes à faire. Maury est enthousiaste. Il participe à la formation menée
pendant 6 mois. Notre royale émissaire le désigne pour poursuivre l’enseignement
régional, elle lui laisse une machine et son manuel.
Maury s’attelle
à la tâche, recrute dans les villages, par voie d’affichage et enseigne chez
lui. Les élèves sont sélectionnées par le curé, elles doivent être jeunes, de
bonnes mœurs, en bonne santé. L’enseignement est de deux mois, rudimentaire, clôturé
par un examen, les diplômées obtiennent le titre de « maîtresse
sage-femme ». Les Affiches du Poitou, quotidien de l’époque, vantent les
résultats de cet enseignement et nous font connaitre les villages de la Vienne
qui ont bénéficié des premiers progrès de santé publique !
Arrive la Révolution.
Le 24 mars 1791, Maury prononce devant le Comité de Surveillance
Révolutionnaire, un plaidoyer pour la poursuite de ses cours d’accouchement, il
exprime son patriotisme, le comité loue son dévouement à la chose publique. Dès
lors les affiches changent de style, l’emphase est là, mais le fond du discours
reste le même. Apprendre l’Art des accouchements c’est « servir la
patrie » ! Sans mentionner le chemin parcouru avant elle, la Révolution
s’attribue le mérite et l’initiative de ce sauvetage de l’humanité naissante et
gémissante ! Les officiers municipaux ont pris la place des curés. Qu’importe le régime, Maury l’humaniste
poursuit sa mission, suivi à Chauvigny et Loudun par d’autres chirurgiens souhaitant
organiser une formation de proximité.
Maury est sur
tous les fronts. On le croise dans les prisons, auprès des inculpées. A la
direction de L’Hôtel Dieu, il enseigne aux carabins. Une année durant, les
guerres de Vendée l’obligent à interrompre ses cours, les blessés sont si
nombreux : « je ne peux me livrer à autre chose qu’à m’occuper du matin
jusqu’au soir du soin de les soulager ». Mais c’est à son initiative que l’enseignement
reprend et ce jusqu’en 1795. Après trente ans de bons et loyaux services, Maury
cesse son activité, reprise partiellement et épisodiquement par ses successeurs
Canolle et Gagnard. Le Journal de la
Vienne couvre le vieux maître
d’éloges : « La patrie réclame de ses talents cette preuve de son
amour pour l’humanité et pour la chirurgie. ». L’Art des accouchements a
déjà ses nostalgiques !
Au bout d’une
longue vie au service des femmes, Maury s’éteint à Poitiers en 1808. Si l’efficacité
de son enseignement fut contestée, nul ne peut douter de son humanisme, de son
dévouement. Les quelques lettres qu’il nous a laissé témoignent qu’il fut un
ardent défenseur des femmes, acteur convaincu de la santé publique. Il faudra
attendre 1842, pour que Poitiers, après un trop long travail de gestation, dernière,
avec Arras, parmi les grandes villes de France, accouche enfin d’une maternité…
Sources :
AD 86 Série L210 et MSAO 1918
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