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A Arçay en 1713, deux femmes et un enfant, le Curé Aubry est
indigné !
Des malheurs d'enfants, le curé Aubry en a vu d'autres.
Le Jeudi 2 novembre 1713, il baptise Jeanne, fille de père
inconnu.
Sa mère, Marie La Carte est veuve de Bourdilleau.
Nombreuses sont les veuves au XVIIIème siècle qui se retrouvent
mendiantes. Certaines se prostituent pour un peu de nourriture ou quelques
sous.
Aussitôt engrossées, aussitôt délaissées.
Même nommé, dénoncé, déclaré, le géniteur n’assume la plupart du
temps, ni la grossesse, ni l’enfant.
Jeanne accouche probablement seule, ce jeudi-là.
La douleur des contractions mûrit son amertume, sa
révolte gronde.
Dès son premier cri, Marie rejette cette petite fille, fruit d'une
vie de misère, d'humiliation et de violence.
Marie La Carte sait bien à qui elle la doit cette violence, et
cette haine qui monte et lui fait rejeter ensemble le sort et l'enfant. Cet
enfant, bien vivante, dont les cris l'exaspèrent.
Marie porte l'enfant au curé qui la baptise Jeanne, ne trouve pas
les mots pour apaiser la mère et ne désigne pas le père. Pourtant Aubry sait
qui est le père.
Marie tient deux jours. Puis craque.
Il n'est pas d'elle cet enfant ! Il est à son oncle, c'est lui qui
la force, qui l'achète !
Marie perd la tête. Il fait froid cette nuit de novembre, mais
rien ne l'arrête plus. Elle court porter la petite Jeanne, deux jours, à la
porte de l'irresponsable !
L’enfant hurlera une heure dehors, seule dans l'hiver et face au
danger des animaux errants et féroces.
C'est la femme Jamain, la femme trompée, qui aura pitié.
C'est elle, Renée, qui va la décrocher de la porte, qui va la
nourrir... à la cuiller d'un peu de lait.
Deux femmes meurtries. L'une rejette l'enfant, l'autre tente de le
sauver.
Comment devient-on mère, comment ne le devient-on pas ?
"Certaines considérations l'en firent oster"....
Renée Jamain trouve-t-elle dans ce panier l'enfant qu'elle
aimerait porter ?
Espère-t-elle en le sauvant conjurer le sort, ramener son homme
dans son lit, unir son destin à celui d'une autre injustice ?
La petite Jeanne meurt 16 jours après son baptème.
Aubry, le curé d'Arçay indigné par la disparition de ce
bébé, tout autant que par l'inconséquence de ses géniteurs, promet dans l’acte
de décès du nourrisson, la colère de Dieu aux responsables, et désigne enfin le
père...
Renée Jamain a-t-elle pleuré cet enfant ? Sans doute.
Jean La Carte a-t-il exprimé des regrets, des remords ? Peut-être.
Ensemble, ils seront parents l'année suivante.
Un petit René naît le 16 Aout 1714, dix mois après la mort de
la petite exposée.
L'histoire ne dit pas ce qu'est devenue Marie La Carte. Le
registre ne lui mentionne aucun autre enfant.
Source : AD 86 BMS Arçay
1713/1732 page 5
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