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On n’alarmera jamais assez sur les dangers des feux de
cheminée, par les hivers qui grelottent
! Mais ils ne sont pas toujours ceux que l’on craint. Les Brûleurs de pied sont
des saisonniers, portés par les vents froids, la neige et les frimas, poussés
par la faim et la misère. Hordes sauvages, ils tracent leur route de village en
village, de maison en maison. Ils sont prêts à toutes les extrémités en
s'attaquant aux nôtres, pour arriver à leurs fins... Craignons les braises sur
lesquelles souffle la misère !
Lorsqu’ils arrivent à huit la nuit du 11 Prairial An IV, les
Barré de Coussay sont couchés. Ils s’emparent du vieux, sous les yeux de sa
femme. Ils le ligotent, le frappent, le jettent à terre, s’emparent de ce qui
leur parait être de valeur. Mais le butin est maigre, comme souvent. Alors, ils
jettent un jupon sur le visage de la vieille, la ligotent à son tour, et
commencent la torture, avec méthode, tellement à l’identique d’une agression à
l’autre, d’un village à l’autre, d’une région à l’autre, que la justice en fait
un délit à part entière : « vol et brûlements de pieds ». Une
méthode qui ressemble à un rituel, qui sévit à travers la France, à tel point que la presse s’en inquiète, à
tel point que les élus s’en alarment. Les bandes se connaissent, les procès se
recoupent.
Le but n’est pas de tuer, mais de trouver le magot. Les
blessures infligées sont toujours graves, elles laissent des séquelles et la
mort est souvent au bout de cette nuit noire. Les brûleurs de pieds sont dans
la Vienne. Leur arme ? La cheminée de la maison. Ce soir là, le fils Barré 22
ans les a entendus arriver. Il est allé chercher les voisins. Les voleurs
s’enfuient en catastrophe, laissant derrière eux un bâton et un couteau. Louise
Guillon, sa mère, est blessée, gravement. Une semaine après l’attaque, les
procédures commencent. Louise raconte. Elle a reconnu le bâton d’un certain
Leclerc, les quatre qui étaient dans la maison avaient un fort accent loudunais
et ressemblaient à des bourgeois. Etienne, le fils Barré revient sur ses
déclarations et dénonce. Ce sont les frères Gaubert² qu’il a vus ainsi que Suffiseau
et Leclerc le cordonnier. Leclerc avouera, mais dira avoir été entrainé. Il
charge Suffiseau et les frères Gaubert. Suffiseau nie. Il dit que c’est son
libertinage qui le perd, qu’on cherche à se venger de lui ! Les frères Gaubert
nient aussi. François Suffiseau Pierre
et René Gaubert François Provost, Pierre
Leclerc et Louis Meunier sont condamnés à mort. Gasselin , le joueur de violon est condamné
par contumace.
L’affaire prend de l’ampleur, des clans se forment, des
témoins viennent défendre Suffiseau et les frères Gaubert, tandis que d’autres les accablent. Mauvaise
vie, petits larcins, tout est à charge. L’appel très circonstancié, sur une
bonne vingtaine de pages, plaide le doute. En vain.
Les six doivent être
exécutés dans les 24 H. C’est la loi. Impossible dit le bourreau, ils sont trop
nombreux ! Il demande de l’aide et l’exécution est reportée au 30 Messidor. Les
condamnés arrivent sur la place de la liberté à Poitiers en tombereau sous
grosse escorte. L’ordre est difficile à maintenir… Juste avant l’exécution,
Pierre Leclerc, et Louis Meunier tout en donnant des précisions sur d’autres
affaires similaires en cours de jugement, disculpent Pierre Gaubert, en vain,
il sera comme les cinq autres, guillotiné.