lundi 13 mai 2013

De la Belgique à la Guyane …En passant par le Poitou !

Source cpa AD86
Petite histoire d'entraide généalogique. 

 Dans la base des Petites Affaires Criminelles de la Vienne, bonne pioche ! 
Chris a trouvé l'un des siens, répertorié.
Chris est loin, trop loin des AD 86. 
 Je suis allée lui photographier le dossier, le parcourant sans le lire, car Chris m'a promis d'en raconter l'histoire. 
Promesse tenue. 
Aujourd'hui Chris  raconte et avec quel talent ! 
Source AD 86 Série 2U 1750
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            Le 5 juillet 1852 naissait à Beauvechain en Belgique (province de Brabant) Guillaume Joseph REMACLE, fils de Marie Joseph REMACLE, marchande ambulante. Peut-être aurait-il pu s’appeler DELHEZ comme sa sœur née en 1850 et son autre sœur née en 1858.  Pourquoi ce petit garçon portait-il nom de sa mère alors ? Peut-être Charles Désiré DELHEZ ne voulut-il pas le reconnaître (il n’était pas marié avec Marie Joseph REMACLE) ou peut-être était-il absent ce jour-là car lui aussi était marchand ambulant. Guillaume Joseph eut le malheur de perdre sa Maman en 1859 alors qu’il avait à peine 7 ans. Ensuite aucun élément ne permet de situer l’enfant dont le « beau-père » mourut à Tournai en Belgique en 1866.

            En 1877 nous retrouvons Guillaume Joseph REMACLE dans le cadre d’une affaire judiciaire en France dans le Loiret (il dira plus tard qu’il était parti avec des voyageurs après la mort de sa mère mais sans préciser la date). Il fut condamné à Orléans le 4 juin 1877 à six mois d’emprisonnement et à deux ans de surveillance pour vagabondage mais considérant que sa présence était de nature à compromettre la sûreté publique le ministre de l’intérieur prononça à son encontre un arrêté d’expulsion le 30 novembre de la même année.

            Guillaume Joseph REMACLE quitta t’il la France ? Rien ne permet de l’affirmer mais toujours est-il que s’il le fit, il y revint car en 1881 il se trouvait à Airvault dans les Deux-Sèvres où il déclara le 5 février la naissance d’un enfant prénommé Henri Joseph né de lui et de Henriette Louise GABRIEL âgé de 15 ans. Il avait alors 29 ans et était employé au terrassement du chemin de fer. Nous apprendrons plus tard que le couple quitta Airvault peu après la naissance de l’enfant.

            En 1882 nous trouvons la trace de Guillaume Joseph dans le Maine et Loire pour une autre affaire judiciaire. Il est en effet accusé du vol d’un tombereau d’une valeur de 100 francs appartenant à un entrepreneur de travaux publics et il sera condamné par défaut (il ne s’était pas présenté) par le tribunal de Saumur à six mois de prison. Aucun renseignement concernant son fils et la mère de celui-ci ne figure sur le jugement. Il était alors carrier au Vieil Baugé, commune du Maine et Loire.

            C’est ensuite en 1888 à Carcassonne (Aude) que Guillaume Joseph REMACLE réapparaîtra. Il aura de nouveau affaire à la justice et sera condamné à six mois d’emprisonnement pour coups et blessures. Puis c’est le tribunal de Cahors (Lot) qui le condamnera en décembre 1890 à huit mois d’emprisonnement pour le vol de chaudrons et de quelques écheveaux de laine et pour avoir contrevenu à l’arrêté d’expulsion du 30 novembre 1877. Le jugement ne fait aucune mention de la situation familiale du prévenu qui exerce alors comme sa mère le métier de marchand ambulant.

            Enfin, Guillaume Joseph REMACLE se manifestera dans le département de la Vienne où une dernière affaire judiciaire scellera son tragique destin. En effet il fut accusé de vol qualifié pour avoir dérobé chez un boucher de Charroux des peaux d’animaux d’une valeur de 200 francs. Au cours de son interrogatoire il commença par nier les faits puis les reconnut pour finalement se rétracter. Concernant sa famille, il déclara que la mère de son fils les avait abandonnés, sans toutefois préciser quand, et que son fils l’avait à son tour quitté un an auparavant. Il précisa qu’il parcourait la région à la recherche de ce fils tout en faisant son commerce. Compte tenu de ses antécédents, il fut condamné par la Cour d’Assises de Poitiers le 28 novembre 1896 à cinq ans de travaux forcés. La commission de classement des condamnés aux travaux forcés statua le 7 avril 1897 qu’il devait être transporté en Guyane Française en 3ème classe ce qui signifie qu’il serait employé aux travaux les plus pénibles. Il chercha à s’évader et fut condamné le 7octobre 1897 par le tribunal maritime spécial à deux ans de travaux forcés.

            La vie de Guillaume Joseph REMACLE s’acheva le 2 janvier 1898 à Matoury tué par un coup de feu tiré par un habitant du pays alors qu’il était en état d’évasion. Les autorités trouvèrent sur lui des lettres attestant qu’il entretenait une correspondance suivie avec son fils Henri âgé de 16 ans qui se trouvait alors pensionnaire de la colonie agricole du Val d’Yèvres dans le Cher.

            Guillaume Joseph REMACLE n’avait  jamais abandonné son fils. Celui-ci émigra au Vietnam où il fonda une famille et sa petite-fille est… mon adorable belle-fille.

            Je tiens à adresser mes plus vifs remerciements à Gloria et à William qui m’ont permis de reconstituer le parcours de Guillaume Joseph REMACLE en se rendant l’une aux Archives départementales de la Vienne et l’autre aux Archives d’Outre-Mer à Aix-en-Provence.

Chris Huot


5 commentaires:

  1. Une histoire digne d'un roman, comme on les aime

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  2. Merci Chris pour cette histoire documentée. A quand votre blog? ;)

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    1. Merci surtout à Gloria sans laquelle je n'aurais pu écrire cette histoire...
      Un blog? j'en aurais bien envie mais je ne suis pas sûre d'être à la hauteur!

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    2. Chris cet article est un bel encouragement à poursuivre l'écriture et la publication. La tenue d'un blog commence souvent très modestement, et petit à petit, l'interactivité aidant, le blog s'étoffe, trouve son rythme, son style. Journal de bord comme lieu de partage, c'est à tenter. Il y a toujours moyen d'essayer dans un premier temps autour d'un petit cercle de lecteurs familiaux.
      Merci d'avoir partagé cette histoire.
      Amicalement.

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  3. Bonsoir,
    Une exposition a lieu à Bourges sur la colonie agricole du Val D'Yevre
    http://www.archives18.fr/article.php?laref=598&titre=encadrer-eduquer-proteger

    Quelle vie rocambolesque et triste aussi...

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